A quoi sert un expert?

je vous propose 10 réponses de 10 experts japonais (issue d'un article de "officiel karaté magazine")

Oshiro Zenei 7ème Dan gojuryu,77ème Dan kobudo

« J’ai commencé le karaté
depuis si longtemps…
Alors pour moi le karaté,
forcément, c’est la vie.
Au début, je voulais devenir
plus fort que les autres,
après on cherche à devenir
plus fort que soi-même.
Techniquement, on
progresse, mais on n’arrive
jamais au bout. C’est
comme la vie ! Rien n’est
jamais fixé, ni définitif.
Le seul secret du karaté,
c’est de cultiver sa
motivation. Pour boire
à la source, il faut avoir soif.
Les motivations des uns et
des autres sont différentes,
mais il faut en avoir. Si on
n’en a plus, alors c’est
qu’on est mort… Nous
avons un point commun,
notre culture du karaté,
de l’entraînement. Nous,
on va partir, c’est la vie
aussi. Alors un expert,
c’est celui qui se charge de
transmettre le message.

OKUBO HIROSHI* Expert tani-ha shito-ryu

« Quand je fais quelque
chose je pense au karaté.
C’est une manière de vivre,
une règle intérieure.
C’est au dojo qu’on acquiert
cette compréhension
et c’est en travaillant avec
les autres qu’on l’affine.
Le dojo, c’est là où on entre
vraiment en relation.
Sans lui, j’ai l’impression
qu’on resterait le plus
souvent coupé des autres.
La relation par le karaté est
profonde et elle transforme
tout le monde. Etre un
expert… C’est vous qui le
dites. Un expert, je ne sais
pas ce que c’est. Moi j’ai
plutôt l’impression d’être
encore un étudiant et
d’avoir de la chance, parce
que dans la vie, en général,
on arrête à 23 ans. Si je suis
un expert, alors moi aussi
j’arrête ! Tandis que là…
je garde mon esprit de
jeunesse. Et puis je préfère
professeur. Les experts sont
figés sur leur expertise, les
professeurs s’adaptent tout
le temps. Bien sûr, après
43 ans de karaté, j’ai pris
mes distances. J’ai abordé
d’autres arts martiaux.
Les enfants doivent quitter
leurs parents pour grandir,
alors j’ai quitté le karaté
et je marche sur mes deux
pieds ! C’est pourquoi je
pense que dans le futur,
les pays devront trouver
leur propre forme autour
de la question centrale :
le karaté est un art
de l’esprit, une méthode
pour bâtir des hommes.
C’est le bushido au Japon,
peut-être la chevalerie
en France…
Si techniquement les
choses bougent, si chacun
cherche sa forme de
pratique et ses rituels,
c’est bien si on garde
cet esprit : Le karaté doit
permettre la mue de
l’insecte que nous sommes
au départ. La chrysalide
doit devenir papillon.
Enfin j’espère ! Moi j’en suis
toujours au cocon… »

SHIMABUKURO YAKINOBU* 7e dan uechi-ryu+


« Le karaté est fait pour
former les gens.
C’est une méthode
d’éducation. Comment cela
fonctionne ? En permettant
aux pratiquants de
travailler sur eux-mêmes,
de devenir plus forts, plus
maîtres d’eux-mêmes.
De comprendre les valeurs
utiles dans le monde et
la société. Le karaté permet
de former des hommes
dont l’existence est utile,
qui deviennent des
membres positifs de
la société. La part
essentielle du karaté est
mentale, mais le physique
et le mental forment
un tout. Quand ils sont
développés ensemble,
l’homme est solide.
Aujourd’hui, être expert
de karaté pour moi, cela
veut dire apprendre
à mieux vieillir ! C’est ce
que je fais. Rester droit
et fort, physiquement et
mentalement. Le karaté est
une éducation qui nous suit
jusqu’à la fin de la vie. »

AOSAKA HIROSHI 8e dan shorinji kempo

« Le shorinji kempo est
différent techniquement,
mais nous sommes proches
du karaté par l’amitié.
La pratique martiale, c’est
la force et l’amour mêlés.
Sans la force, on ne peut
pas vivre dans un monde
si dur. On ne peut rien.
Les autres vous maltraitent
et vous dominent.
La pratique martiale donne
la force pour pouvoir aller
vers l’amitié. Seuls ceux
qui ont cette force peuvent
se permettre d’être gentil
et aimable avec les autres.
C’est à cette condition
qu’on peut apporter cet
élément essentiel de la vie,
la compassion, la douceur,
la gentillesse. La pratique
martiale est faite pour
embellir la vie ! Par elle,
on se donne une belle vie,
par elle on peut apporter
la fraternité autour de soi.
En pratiquant
régulièrement on préserve
aussi sa santé, sans laquelle
rien n’est possible.
J’ai soixante ans, cela a
bien marché dans
mon cas. »

KAWANISHI EIJI 7e dan shukokai shito-ryu

« Il y a beaucoup
de chemins, beaucoup
de facettes… Le combat,
la compétition, c’est
la victoire d’un moment,
la victoire finale, le but,
c’est d’atteindre la sérénité.
Le karaté est une méthode
pour devenir plus serein,
plus tranquille. Il n’y a pas
besoin de méditation pour
cela, le karaté suffit. Vous
connaissez cette image
de la montagne ? Plusieurs
chemins mènent au
sommet. Le karaté en est
un. Un seul secret,
malheureusement,
la transpiration. Une base
essentielle, les kihon.
Il n’y a que dans les films
qu’on devient un héros !
Le karaté c’est le karaté,
alors les experts servent
à le préserver. Ce sont
des gardiens de phare,
des guetteurs en quelque
sorte. Et puis ils sont là
aussi pour se corriger
les uns les autres. Ce qui est
important c’est d’aller
droit. Doucement
peut-être, mais sans
se tromper de chemin.
Se croire arrivé, se croire
bon, c’est sortir de la voie.
Le karaté est assez grand,
j’espère, pour nous amener
jusqu’en haut. Sinon
j’aurais fait autre chose,
je me serais mis au vélo !
Je crois qu’il ne faut pas se
disperser, si on cherche trop
autour, on perd la direction.
Je monte doucement
la montagne et je suis
encore très bas. J’ai décidé
d’aller à pied. »

KAMOHARA TSUTOMU 6e dan shukokai shito-ryu


« Entre la naissance et
la mort, il n’y a pas
grand-chose, pas beaucoup
de temps. Dans la société,
on est toujours en rivalité,
en état de stress, c’est notre
quotidien. Alors je crois
que le karaté nous permet
de profiter au maximum
de la vie. C’est un
entraînement pour faire
face, un moyen de forger
le corps et l’esprit. Mais
il faut que les techniques
soient efficaces, sinon cela
ne sert à rien. Le principe
de la self-défense, c’est
ce qu’on cherche et c’est
en cherchant cela qu’on
devient plus fort dans
la vie. Le secret ?
Bien sûr qu’il y en a un :
c’est notre tradition.
Nos ancêtres nous ont
laissé un patrimoine
d’une immense richesse
dont chacun peut s’emparer
aujourd’hui pour faire
de sa vie quelque chose,
pour faire de soi-même
quelque chose. C’est ça
le secret du karaté !
Et il y en a un autre
à mon avis : Dans un groupe
de 50 élèves, tout le monde
doit progresser, pas
seulement une élite.
C’est le rythme du groupe
en progression qui compte.
Ce que j’espère c’est que,
après la diffusion mondiale,
on s’occupe désormais
de la qualité du karaté
enseigné. Pour que
dans 100 ans, le karaté
soit meilleur que celui
d’aujourd’hui. »

TSUKADA RYOZO 7e dan shito-ryu

« Je me le demande… Je ne
sais vraiment qu’une chose,
le karaté est un grand
plaisir. Le plaisir de ma vie.
C’est ma culture japonaise,
mon art de santé. Sinon
je ne connais aucun secret.
Je crois qu’il n’y en a pas !
Pas de compréhension
cachée, pas de potion
magique… Et pas d’expert
non plus. Il est probable
que j’en connaisse un peu
plus que d’autres,
mais expert, maître…
Moi c’est un mètre
soixante-dix seulement,
alors ! Un expert, c’est
un étudiant avec un peu
d’expérience. Je ne sais pas
ce que j’apporte aux autres.
Je ne sais pas ce qu’ils
y trouvent physiquement,
techniquement, moralement.
Je crois juste que
les techniques de karaté
sont très intéressantes
et pas uniquement pour
casser la figure aux gens.
Je crois aussi que le budo,
ce n’est pas seulement
la défense, mais un moyen
d’apprendre à aimer les
autres, partenaires et amis.
Je suis innocent et je n’ai
pas le vocabulaire pour
expliquer. Je ne suis pas sûr
qu’on peut vraiment
expliquer et d’ailleurs on
n’en a pas besoin. Quelque
chose passe… J’espère juste
continuer à répéter
les mouvements. Le karaté,
c’est juste ça : répéter
jusqu’à la fin de la vie.
Et ça, c’est toute la vie. »

NAKAHASHI HIDETOSHI *8e dan shito-ryu

« Dans mes cours, j’ai
beaucoup de médecins,
mais ils sont malades !
Moi, non. J’ai 61 ans et
je suis en pleine forme.
Alors pour dire à quoi sert
le karaté, je n’ai pas besoin
de parler beaucoup, il suffit
que je montre ! Le karaté
c’est la jeunesse, la santé
et la paix ! Mais moi,
ce n’est rien. Maître
Mabuni, à 88 ans, il mange
comme nous, il a plus de
mémoire que nous.
Et je me souviens d’être allé
au Japon avec Francis
Didier, il y a très longtemps
quand nous étions jeunes.
On a visité les dojos et vu
beaucoup de vieux maîtres.
Et il y en avait un, très vieux
maître de Kyudo, qui avait
regardé Francis, qui était
champion, et qui lui avait
dit gentiment « encore trop
dur dans les épaules ».
Ce sont des souvenirs
importants… Dans
le karaté, on apprend
à respecter les anciens
et à les remercier pour ce
qu’ils donnent. Remercier
le maître, c’est très
important, on ne jette pas
les vieux en karaté !
Les Français ont facilement
la grosse tête, il faut
respecter les Japonais parce
qu’ils peuvent encore leur
apprendre ça ! Un expert ?
C’est quelqu’un qui s’est
toujours entraîné pour
avoir la bonne énergie pour
pouvoir donner aux élèves.
Un expert n’est pas fatigué
et toujours souriant, en
plus de dégager sur le plan
technique. Après plus
de 50 ans d’expérience
de kimono, je trouve que
le karaté, c’est simple.
Ce qui compte c’est de
s’occuper de soi-même pour
pouvoir donner. Il n’y a pas
de diplôme qui tienne,
il faut aller toujours plus
loin, toujours travailler. Je
suis un petit étudiant avec
Mabuni malgré mes 61 ans
et je suis content de ça. »

SATO YUICHI 6e dan shotokan

« Quand j’étais
petit, j’ai fait
du karaté pour
être fort. Jeune,
j’étais très
bagarreur !
Après des années,
j’ai compris que
le plus important
ce n’est pas ça.
Le karaté
m’a éduqué,m’a
développé
mentalement
et moralement.
Certains aiment la culture
du karaté, d’autres, c’est
la discipline, pour d’autres,
c’est la self-défense
qui est importante.
Moi je pense que le cadeau
du karaté, c’est la
confiance. Une confiance
très forte ! La confiance
qui naît de la force et
des capacités physiques
est si puissante qu’elle
peut monter à la tête.
Mais bien sûr, pour cela,
il faut travailler. On peut
tout trouver dans le karaté,
mais il faut se donner à
fond. Si on ne travaille pas,
il est impossible d’avoir
confiance. Après, devenir
expert… cela ne sert à rien.
C’est juste pour soi-même.
De toute façon, si je n’ai pas
de valeur, les élèves ne me
respecteront pas.
Dans le futur, la dimension
physique du karaté devrait
s’améliorer encore. Quand
on voit les progrès de
l’athlétisme par exemple,
on peut penser que nous
irons nous aussi beaucoup
plus loin. Mais
mentalement, j’espère
que cela ne changera pas. »

UEMURA SHIGERU Expert en taido

«L’histoire du karaté
okinawaiien n’est pas
la même que celle du karaté
japonais. L’une vient de
la Chine, l’autre de l’esprit
samuraï. J’ai cherché
à retrouver chaque essence
en voyageant dans les dojos
et il me semble que
le contenu fondamental est
assez simple : le karaté, c’est
l’art de développer la force
explosive. Par compression,
extension, frottement,
autant de façons de faire
de l’énergie… Ce n’était pas
pour se battre que les
anciens ont travaillé
ces techniques. Le combat
à mains nues, cela n’existe
pas vraiment.
Ils cherchaient à développer
l’instinct juste, à ne pas
le laisser s’atrophier sous
l’humain. L’animal humain
ne sait même plus ce qu’il
doit manger dans la nature !
Les animaux ne perdent pas
la tête en vieillissant, ne
se battent que quand c’est
nécessaire, en cherchant
à régler des problèmes
de territoire. Chez l’homme,
c’est ambigu, certains
cherchent le risque plus bas
que les bêtes. L’homme
a trois langages : celui de
la guerre, celui de la contreguerre
– l’art de se
défendre –, celui de la paix.
On ne commence
malheureusement pas
par la paix. La réalité nous
montre qu’il faut savoir
imposer sa force.
Le karaté donne de la force
et apprend des choses
essentielles que les autres
ont oublié, comme le sens
et le respect de l’espace
de l’autre, savoir se battre
s’il le faut. Le karaté nous
apprend l’instinct juste et
c’est essentiel. Qui peut
le faire dans nos sociétés ?
Sûrement pas les
psychologues. Tu me
demandes le secret
du karaté ? Je pense que
c’est la façon de procéder
pour produire de la force.
Au début on additionne,
on produit énormément
d’énergie pour faire le
mouvement, en vieillissant,
on entre dans le monde
technique : on n’utilise pas
la force pour bouger, c’est
en bougeant qu’on produit
de la force. Le mouvement
produit la force. »

Tous ces experts ontune chose en commun,ils pensent tous qu'être expert est le travail sans cesse répété,inlassablement pour s'améliorer et faire passer le message au monde qui les entoure,que les autres à leurs tour s'améliorent aussi.Enfin c'est juste mon avis...

ouii je suis d'accord
je dit pareil